Cour Administrative d’Appel de Marseille, 6 juin 2025, n° 24MA01046
Les faits de l’affaire :
Par un arrêté du 08.03.2022 le préfet des Alpes-de-Haute-Provence a drastiquement modifié les droits d’eau dont bénéficiaient les requérants, en abaissant le débit autorisé de 220 litres par seconde à seulement 70 litres par seconde.
Avec l’aide du Cabinet TERRAE AVOCATS, les détenteurs de ce droit ont formé un recours contentieux à l’encontre de cet acte.
Le tribunal administratif de Marseille a réformé cet arrêté en fixant le débit maximal autorisé du prélèvement global à 220 litres par seconde.
Insatisfait de ce jugement, le Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires a relevé appel de ce jugement.
Un rappel nécessaire des conditions strictes de déchéance d’un droit d’eau fondé sur titre :
La Cour Administrative d’Appel de Marseille a, elle aussi, conclu à l’irrégularité de l’arrêté préfectoral.
Après avoir précisé la nature juridique du droit d’eau fondé sur titre, qualifié de droit réel immobilier, la Cour a ensuite rappelé, conformément à la jurisprudence constante du Conseil d’État, qu’un tel droit ne pouvait se perdre « que lorsque la force motrice du cours d’eau n’est plus susceptible d’être utilisée par son détenteur, du fait de la ruine ou du changement d’affectation des ouvrages essentiels destinés à utiliser la pente et le volume de ce cours d’eau ».
Or, en l’espèce ni la ruine des installations, ni le changement d’affectation des ouvrages essentiels destinés à utiliser la pente et le volume du cours d’eau n’étaient démontrés, de sorte que la juridiction a confirmé qu’aucune déchéance du droit d’eau ne pouvait être valablement retenue par le préfet :
« Il est constant que la prise d’eau au niveau du seuil de Gréoux et le canal de N., installations qui assurent la dérivation et l’acheminement des eaux vers les domaines de P. et d’A., sont en état de fonctionnement. Il est également constant que l’alimentation en eau est utile aux deux domaines.
(…)
Dans ces conditions, ni la ruine des installations, ni le changement d’affectation des ouvrages essentiels destinés à utiliser la pente et le volume du cours d’eau ne sont démontrés. Par voie de conséquence, la préfète des Alpes-de-Haute-Provence n’a pu légalement constater la déchéance des droits d’eaux fondés sur titre dont disposent les propriétaires du domaine de P. en vertu de l’arrêté préfectoral du 12 juin 1907 ».
La réformation de l’arrêté du 08.03.2022 s’avérait donc pleinement justifiée. La cour a, en conséquence, rejeté l’appel formé par le Ministère de la transition écologique.